Karen Langley,
The Wall Street Journal
NEW YORK (Agefi-Dow Jones)--Les investisseurs qui se hasarderont à
nouveau sur les marchés cette semaine seront confrontés à une
situation très inhabituelle. Il leur faudra composer avec des
indices actions imprévisibles alors que des failles lézardent en
profondeur le premier marché mondial de taux d'intérêt.
L'indice DJIA a plongé de 10% la semaine dernière, même après avoir
enregistré vendredi son gain le plus important depuis 2008 avec une
progression de 9,4%. L'avancée de vendredi est intervenue dans un
contexte de rebond du cours de l'or noir, qui a accusé sa plus
forte baisse hebdomadaire en pourcentage depuis 2008, signe d'un
fonctionnement normal du marché.
De nombreux opérateurs et analystes restent toutefois prudents,
alertés par certains signes de détresse sous-jacents. L'or,
habituellement très prisé en période de turbulences, a accusé sa
pire semaine depuis 2011 avec une chute de 9,3%, effaçant tous ses
gains de 2020. L'argent, plus volatil, a dégringolé de 16% et
s'inscrit en baisse de 19% depuis le début de l'année. Elément sans
doute plus inquiétant encore, les emprunts du Trésor américain ont
bu la tasse, le rendement de l'emprunt à 10 ans ayant gagné du
terrain pendant quatre séances consécutives.
Le fort repli de ces actifs refuges a attiré l'attention des
traders et banquiers tout autant que celle des régulateurs. Cette
situation a conduit la Réserve fédérale à opter pour l'une de ses
interventions les plus musclées depuis des années. La Fed, qui
avait annoncé jeudi dernier mettre à disposition des banques plus
de 1.500 milliards de dollars de prêts à court terme dans le cadre
d'opérations de prises en pension de titres ("repo"), a en outre
ramené dimanche soir son principal taux directeur à un niveau
proche de zéro et annoncé l'achat de 700 milliards de dollars
d'obligations du Trésor américain et d'actifs adossés à des
emprunts hypothécaires (MBS).
Quand la volatilité devient la norme
De nombreux investisseurs s'attendent toutefois à ce que la
volatilité reste la norme.
"Au départ, lorsque le marché s'inscrivait en baisse, les
Treasuries remplissaient bien leur rôle", souligne Jack
Janasiewicz, gérant de portefeuille chez Natixis Investment
Managers Solutions. "Ensuite, ce fonctionnement a commencé à
s'enrayer. C'est à ce moment-là qu'on se dit qu'il vaut sans doute
mieux s'en tenir aux liquidités".
Les taux ont augmenté alors même que de nombreux analystes
s'attendaient à ce que la Fed abaisse ses taux à près de zéro cette
semaine. Le taux de l'emprunt à 10 ans a atteint 0,946% vendredi,
contre un point bas record de 0,501% lundi dernier.
Si la montée des taux n'est pas suffisamment marquée pour poser un
problème aux entreprises et à d'autres emprunteurs, le spectacle
d'emprunts obligataires qui augmentent en pleine période de
recherche de sécurité sur les marchés a désarçonné certains
investisseurs, surtout au vu de l'ampleur du rebond obligataire qui
avait précédé le mouvement de vente.
L'ampleur de ce rebond est particulièrement visible dans les
corrélations sur trois mois glissants entre les emprunts d'Etat et
le S&P 500, sur la base des rendements hebdomadaires totaux --
plus-values et versements périodiques tels que les dividendes.
Au 3 mars, à peu près au milieu du mouvement de vente actuel, la
corrélation était de -0,84, selon les données de Goldman Sachs. Ce
niveau, le plus bas niveau depuis janvier 2015, signalait une
correspondance presque parfaite entre rebond des actions et
mouvements de vente obligataires, et vice-versa. La fourchette de
corrélations va de -1 à 1, -1 signifiant que deux éléments évoluent
dans des sens opposés et 1 signalant qu'ils évoluent de
concert.
Actions et obligations n'ont toutefois pas systématiquement évolué
de façon opposée au cours de la semaine passée, et la corrélation
glissante est montée jeudi à -0,64. Opérateurs et investisseurs ont
signalé que l'essentiel du mouvement de vente sur les emprunts du
Trésor était dû aux inquiétudes des banques concernant leurs
bilans, tandis que d'autres ont évoqué le débouclage de certaines
positions de fonds alternatifs basées sur des emprunts. Quelle que
soit la raison, ce dérèglement de l'une des corrélations les plus
surveillées du marché a renforcé l'inquiétude des opérateurs,
soulignent certains gérants de portefeuille
Dans le même temps, les mesures exceptionnelles adoptées par la Fed
et les annonces gouvernementales concernant les actions d'urgence à
mener face à la pandémie ont redonné courage à de nombreux
investisseurs
Certains opérateurs précisent que l'ampleur du mouvement de vente
pourrait permettre aux plus audacieux de saisir quelques
opportunités.
"A vendre"
L'indice DJIA s'inscrit en baisse de plus de 21% par rapport à ses
points hauts du mois dernier, et l'essentiel du mouvement de vente
a été si précipité qu'il n'a pu qu'être excessif, estiment certains
investisseurs. Après le pic atteint le 19 février par le S&P
500, ce dernier, l'indice actions élargi MSCI AC World ex USA,
l'indice de matières premières S&P GSCI et le rendement de
l'emprunt américain de référence ont tous accusé sept séances
consécutives de baisse, première série baissière de cette ampleur
depuis que ces données sont disponibles, soit mai 1995, selon Dow
Jones Market Data.
Alors que les prévisions de résultats ont commencé à être revues en
baisse et que l'OCDE a prédit un fort ralentissement de la
croissance économique mondiale en raison des mesures prises par les
différents gouvernements pour tenter de contenir la pandémie de
coronavirus, l'ampleur de la crise reste incertaine.
"Le marché arbore un écriteau 'à vendre'", constate Brendan
Connaughton, associé gérant de Catalyst Private Wealth.
Sa société de gestion envisage d'investir dans certaines actions
qu'elle juge sous-évaluées. Sa liste prospective inclut
Salesforce.com Inc., Johnson & Johnson, AbbVie Inc. et
Amazon.com, qui se sont considérablement éloignées de leurs points
hauts mais ont fait mieux que l'ensemble du marché en 2020.
Nombreux sont les investisseurs qui expliquent que leur anxiété est
accentuée par le fait qu'il n'existe aucun précédent sur lequel
s'appuyer pour estimer jusqu'à quel point la pandémie fera dévier
la trajectoire de croissance.
"Nous avançons tous complètement à l'aveugle", conlut Liz Ann
Sonders, stratégiste responsable des investissements chez Charles
Schwab.
-Karen Langley, The Wall Street Journal
(version française Emilie Palvadeau) ed : ECH
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(END) Dow Jones Newswires
March 16, 2020 07:59 ET (11:59 GMT)
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