Pour réduire sa décote, Alstom doit prouver que son cash est sur de bons rails -DJ Plus
December 12 2019 - 6:48AM
Bourse Web Dow Jones (French)
Julien Marion,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--A l'approche de Noël, Alstom a bien garni
sa hotte. L'équipementier ferroviaire a engrangé les commandes au
cours des dernières semaines, signant encore mardi un contrat de
près de 800 millions d'euros en Australie. Depuis la mi-novembre,
les prises de commandes annoncées par la société dirigée par Henri
Poupart-Lafarge, s'élèvent à plus de 2 milliards d'euros.
Cette moisson démontre que la demande pour les produits du
spécialiste du ferroviaire ne faiblit pas, rassurant les
observateurs les plus sceptiques. Morgan Stanley a souligné la
semaine dernière que l'action Alstom accusait un retard boursier
par rapport à ses comparables, s'échangeant 15 fois les bénéfices
attendus pour l'exercice 2020-2021, soit une décote d'environ 10%
par rapport à ses pairs. La banque estime que cette relative
sous-évaluation traduit les inquiétudes des investisseurs sur
l'évolution séquentielle des commandes et sur la génération de
trésorerie.
Si les récents succès commerciaux du groupe invitent à l'optimisme
Alstom doit encore démontrer sa capacité à étoffer sa génération de
trésorerie.
Des grands contrats qui pèsent temporairement sur la trésorerie
Le cash constitue le talon d'Achille récurrent d'Alstom dont
l'exécution s'avère par ailleurs sans accroc. Morgan Stanley estime
que le groupe devrait en moyenne convertir 33% de son résultat net
en flux de trésorerie (cash-flow) libre, entre les exercices
2016-2017 et 2019-2020. A titre de comparaison, ce taux de
conversion s'inscrivait à environ 64% en 2018 pour l'équipementier
ferroviaire allemand Knorr-Bremse.
Sur son premier semestre clos en septembre (exercice 2019-2020),
Alstom a brûlé 19 millions d'euros de cash contre un flux de
trésorerie libre positif de 172 millions d'euros un an plus tôt. En
retraitant certains éléments, Deutsche Bank estime que la sortie de
trésorerie sous-jacente se serait rapprochée de 400 millions
d'euros au premier semestre. La banque allemande juge
"préoccupante" la déconnexion entre les résultats de l'entreprise
et la génération de cash.
Le directeur financier d'Alstom, Laurent Martinez, a expliqué le
mois dernier que l'évolution de la trésorerie du premier semestre
ne présentait aucune surprise et suivait les orientations
stratégiques, dévoilées lors de la journée consacrée aux
investisseurs en juin.
La génération de trésorerie du groupe est pénalisée par la montée
en puissance des stocks liée à l'exécution de grands projets de
matériel roulant. C'est notamment le cas du contrat signé en 2013
avec l'opérateur sud-africain PRASA, qui prévoit la livraison de
600 trains, ou encore de la commande passée en 2015 par le
gouvernement indien portant sur 800 locomotives électriques.
Les analystes majoritairement à l'achat
Cet impact négatif sur le besoin en fonds de roulement (BFR) pèsera
encore au deuxième semestre et sur l'exercice 2020-2021 avant de
disparaître. Alstom a promis de se focaliser sur l'amélioration de
sa génération de trésorerie, via son programme "Cash Focus", et de
stabiliser son BFR à moyen terme. L'industriel ambitionne de
convertir d'ici à mars 2023, plus de 80% de son résultat net. Pour
y parvenir, Alstom doit faire passer ses investissements (capex) de
2,5% du chiffre d'affaires à 2% d'ici à mars 2023. L'équipementier
ferroviaire devra aussi améliorer les performances de sa chaîne
logistique ou encore réduire la durée des tests de ses produits de
20%. Le groupe a par ailleurs fixé à 10.000 salariés des objectifs
alignés sur la performance de la génération de trésorerie pour
l'exercice 2019-2020.
Les analystes accordent du crédit à ces ambitions. JPMorgan
Cazenove s'attend à une hausse "considérable" du flux de trésorerie
libre d'ici à mars 2023. UBS considère que les inquiétudes sur le
cash sont "exagérées", un constat partagé par Morgan Stanley.
Alstom a intérêt à démontrer au plus vite que ses efforts en
matière de trésorerie paient. Les investisseurs n'auraient ainsi
qu'à évaluer les réussites opérationnelles et commerciales du
groupe.
L'industriel compte afficher en mars prochain un flux de trésorerie
libre dans le vert pour l'ensemble de l'exercice 2019-2020, ce qui
constituerait un point d'étape intéressant. Si Deutsche Bank
considère cette cible "ambitieuse", Morgan Stanley table sur un
flux de trésorerie de 60 millions d'euros, soit presqu'autant
qu'Oddo BHF (63 millions d'euros).
Alstom offre une visibilité sur sa croissance et sa rentabilité qui
en font une action "séduisante" aux yeux d'UBS. Plus largement, 60%
des analystes recommandent d'acheter le titre, selon FactSet. En
renforçant sa trésorerie, Alstom élargirait certainement le cercle
des opérateurs à l'achat et réduirait sa décote.
-Julien Marion, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 94;
jmarion@agefi.fr ed: ECH
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